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samedi 2 avril 2011

Afghanistan : douze morts dans une attaque contre l'ONU


De la fumée s'élève d'un bâtiment de l'ONU à Mazar-e-Sharif, après l'attaque de vendredi. Crédits photo : Mustafa Najafizada/AP

Sept étrangers et cinq Afghans ont été tués vendredi après une manifestation organisée à Mazar-e-Sharif, dans le nord du pays. Un rassemblement visant à protester contre l'autodafé d'un exemplaire du Coran, fin mars aux États-Unis.

Un pasteur intégriste qui brûle un exemplaire du Coran. La scène se déroule le 21 mars dernier à Gainesville, une ville du sud de la Floride (États-Unis). Cet autodafé a engendré vendredi une réponse sanglante en Afghanistan. À Mazar-e-Sharif, une grande ville du nord du pays (voir carte ci-dessous), sept employés du bureau de l'Unama, la mission de l'ONU en Afghanistan, ont trouvé la mort, selon le bilan officiel des Nations unies. Ils ont été tués lors d'une attaque lancée par des manifestants. Cinq protestataires ont aussi été tués. Si ce bilan se confirme, il s'agirait de l'attaque la plus meurtrière contre l'ONU en Afghanistan depuis l'invasion de ce pays par une coalition internationale fin 2001, pour faire tomber le régime des talibans.
Environ 2000 personnes étaient descendues dans les rues de cette ville habituellement tranquille après la prière du vendredi pour protester contre l'autodafé intervenu aux États-Unis. Le rassemblement ne devait pas à l'origine se diriger vers les bureaux de l'ONU, selon le gouverneur de la province de Balkh, dont Mazar-e-Sharif est la capitale. Mais des manifestants se sont attaqués au bureau en lançant des pierres. Ils ont escaladé les barrières et ont pénétré dans le bâtiment, où ils s'en sont pris au personnel, a-t-on précisé de source policière. Selon un porte-parole de la province, certains manifestants se sont emparés des armes des gardes et ont tiré sur la police. Ils ont aussi mis le feu au bâtiment. Le chef de la mission locale de l'ONU a été blessé. Les violences ont duré plus de deux heures.
Selon le dernier bilan, sept employés de l'Unama ont été tués. Il s'agit de quatre Népalais et trois autres étrangers, d'après l'ONU. Cinq manifestants ont été tués, 20 blessés et plus de 20 insurgés impliqués dans l'attaque ont été arrêtés. Le bilan pourrait toutefois atteindre 20 victimes, selon des responsables onusiens cités par Reuters.

Acte «révoltant et lâche»

Réagissant à cette attaque, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a condamné un acte «révoltant et lâche». Son représentant spécial, Staffan De Mistura, est en route pour Mazar-e-Sharif. La Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères, Catherine Ashton, s'est dite dans un communiqué «profondément choquée» par cette attaque. Le président américain, Barack Obama, a condamné fermement l'attaque et lancé un appel au calme. Même condamnation de la part du secrétaire général de l'Otan, Anders Fogh Rasmussen, et du ministère français des Affaires étrangères. «En s'attaquant aux Nations unies, qui oeuvrent pour la stabilisation et le développement de l'Afghanistan, les auteurs de ces actes s'en prennent directement aux Afghans et à leur désir de paix», a dit dans un communiqué le porte-parole du Quai d'Orsay. Le ministère russe des Affaires étrangères a enfin appelé le gouvernement afghan et les forces internationales présentes dans le pays à prendre des mesures pour protéger le personnel de l'ONU.
L'autodafé d'un livre du Coran, en mars, avait été l'oeuvre d'un pasteur intégriste américain, Terry Jones. Il avait d'abord menacé de brûler un exemplaire du livre à l'occasion de la commémoration des attentats du 11 septembre 2001. L'initiative avait suscité un tollé dans le monde musulman, occasionnant des manifestations parfois violentes. Le Pape et plusieurs dizaines de chefs d'État avaient condamné le projet, auquel le pasteur avait fini par renoncer. Mais le 21 mars, à l'issue d'un «procès» et d'environ huit minutes de délibération, le Coran a été jugé «coupable» puis «exécuté». Le tout lors d'une cérémonie ouverte au public, en présence d'une trentaine de personnes.


 Vendredi, un peu plus de 200 manifestants ont par ailleurs défilé vers l'ambassade américaine située dans la capitale afghane, Kaboul. Ils protestaient contre cet autodafé mais aussi contre l'installation évoquée de bases américaines permanentes en Afghanistan. Les manifestants, qui ont brûlé un drapeau américain, ont défilé aux cris de «Nous ne voulons pas de l'Amérique sur notre sol !»

source:Le Figaro.