Le score du FN conduira le président à s'adresser à cet électorat, sans négocier avec Marine Le Pen.
Nicolas Sarkozy avait annoncé une «surprise» au premier tour: il espérait devancer son adversaire socialiste. Il arrive finalement en deuxième position (27,3 %, selon l'estimation TNS Sofres), derrière François Hollande (28,6 %). Depuis plus d'un an, le candidat de la majorité sortante avait misé gros sur une arrivée en tête au premier tour. Cet objectif n'est pas atteint. Mais la «surprise» annoncée par Nicolas Sarkozy s'est produite: elle s'appelle Marine Le Pen (autour de 18 %).Dimanche soir, le président sortant s'est présenté devant ses militants, à la Mutualité, vers 21 h 40. Il s'est félicité d'une participation haute qui montre «que les Français ont pris la mesure du choix historique» et qu'ils ont «déjoué tous les pronostics». Une façon de se présenter une nouvelle fois comme le candidat du peuple contre les élites. Il a surtout assuré qu'il «comprenait» les «angoisses» exprimées par les électeurs de Marine Le Pen lors de ce «vote de crise». Il a rappelé que les thèmes majeurs de son projet répondent aux attentes des électeurs du Front national: la défense des frontières, la sécurité, la valorisation du travail contre l'assistanat, et «l'amour de la patrie».
Persuadé que François Hollande fait campagne sur l'ambiguïté et l'esquive, si ce n'est le «mensonge», il lui a lancé un défi, en lui proposant trois débats entre les deux tours. Une proposition immédiatement refusée par le candidat socialiste. Devant ses proches, le président sortant répète qu'il «explosera» son adversaire lors d'une confrontation des idées et des projets. Il veut le faire «sortir du bois».
Depuis le début de sa campagne, Nicolas Sarkozy avait bien anticipé un vote populiste massif en faveur de Marine Le Pen et avait axé son discours en conséquence: une campagne s'adressant «au peuple» et résolument ancrée à droite. Cette stratégie n'aura pas été suffisante pour empêcher la hausse du Front national. Elle lui aura néanmoins permis d'éviter un 21 avril à l'envers. «La ligne voulue par Patrick Buisson était la bonne et si on l'avait maintenue jusqu'au bout on serait en tête», confiait dimanche un proche de la campagne, en ciblant «ceux qui ont fait des appels du pied à Bayrou avant l'heure».
Dès vendredi, Nicolas Sarkozy avait prévu de lancer un double appel: au centre à destination de François Bayrou, bien sûr, mais aussi, et surtout, à la France du «non». C'est finalement à cette France en colère que Nicolas Sarkozy devait s'adresser en priorité ce dimanche. Ce résultat «rebat complètement les cartes», estime-t-on au QG, «on passe d'un scrutin plié d'avance à un scrutin ouvert», ajoute-t-on.
Lors d'une réunion de stratégie à l'Élysée en début de soirée, avec les ténors de la majorité, Sarkozy a critiqué les prédictions de sondeurs. «Où est-elle cette poussée de gauche qu'on nous avait annoncée?», a-t-il interrogé. Selon lui, la victoire au deuxième tour est «tout à fait jouable».«Il faut tout donner», a-t-il ajouté. «Est-ce qu'on est bien d'accord avec la stratégie?», a interrogé le président, avant de répondre: «On ne change pas de valeurs, de thèmes. On ne négocie avec personne.» «La négociation n'est pas dans l'esprit d'une élection présidentielle», a-t-il ajouté. «On ne franchit pas les lignes rouges», décrypte un participant à la réunion.
Le président et son conseiller Patrick Buisson ont en outre répété que les «œillades» à François Bayrou avant le premier tour avaient été contre-productives. L'urgence n'est donc plus aux appels du pied à François Bayrou, même si les priorités des centristes resteront au cœur de cet entre-deux tour: «Nous allons rester intraitables sur la dette et les déficits», résume un élu UMP. Nicolas Sarkozy, qui estime avoir été pénalisé par l'égalité du temps de parole, mise dans les deux semaines à venir sur un temps d'exposition retrouvé (50 %) pour inverser la tendance.
source: Le Figaro